Dans une réflexion sur le rôle et les limites du journalisme, une question se pose : à quel moment un journaliste est-il en droit d'exprimer son opinion personnelle ? Est-ce même dans le cadre de ses fonctions ? Bien que je n'adhère pas personnellement à cette profession, cette interrogation demeure pertinente. En parallèle, un événement marquant dans le monde du surf a retenu mon attention. Laura Enever, une sportive que j'admire, vient de marquer l'histoire de ce sport. Elle a établi un nouveau record en surfant la plus grosse vague jamais prise par une femme à la rame. J'ai mis du temps à écrire ces quelques lignes, car j'ai un avis différent...
Laura Enever, ancienne championne mondiale junior de l'ISA, surfeuse de l'élite du Championship Tour (CT) et commentatrice de la WSL, originaire de North Narrabeen, vient de réaliser un exploit historique. À l'âge de 31 ans, elle a remporté le titre de la plus grande vague jamais surfée par une femme à la rame, une performance exceptionnelle accomplie à Himalayas, Oahu, le 22 janvier 2023. La vague, mesurée à 43,6 pieds (soit environ 13,3 mètres) par la World Surf League, dépasse le précédent record détenu par Andrea Moller, qui avait surfé une vague de 42 pieds (12,8 mètres) à Peahi en janvier 2016. Félicitation Mesdames, vous avez toute mon admiration
Le processus de mesure des vagues pour les récompenses de grosses vagues de la WSL est souvent sujet à débat et entouré de confidentialité (honnêtement c'est une mission impossible que je leur laisse bien volontier). Cette année, la WSL a révélé sa méthodologie : une équipe de scientifiques et d'ingénieurs a analysé les vagues en utilisant des techniques variées, y compris des séquences vidéo, des informations détaillées sur le site, la position des caméras et la localisation de la vague. Des corrections géométriques ont été apportées aux images, et grâce à des objets de référence comme des jetskis ou le corps de la surfeuse, la taille des vagues a pu être précisément évaluée.
Lors des Big Wave Awards 2015, la performance impressionnante de Benjamin Sanchis sur ce qui a été surnommé la « vague des 100 pieds » à Nazaré n'a pas été retenue pour les catégories Ride of the Year et XXL Biggest Wave. La raison invoquée était que le surfeur originaire des Landes avait chuté à la fin de sa course. Cependant, cette tentative audacieuse ne s'est pas soldée sans reconnaissance. Bien qu'ironiquement moins prestigieux, Sanchis s'est vu décerner un prix cette année-là, celui de la plus grosse chute.
Quand je regarde la vague de Laura Enever, je ne peux m'empêcher de penser que c'est un wipe-out ou du moins que la vague est incomplète. Je ne critique pas la taille, et l'engagement, elle mériterait un titre pour ces qualité. Mais, elle est engloutie par une montagne d'écume avant même d'atteindre le bottom sur cette vague. Ce qui a suscité de nombreux commentaires remettant en question la validité du record. Des réactions telles que :
« Ce ne peut être un record du monde puisqu'elle n'a pas réussi à atteindre le bas de la vague. Mais chapeau bas à Laura pour avoir tenté de surfer une telle bête ! »
« Chapeau à elle, elle a vraiment attaqué, mais c'était plus une chute, la lèvre de la vague l'a écrasée. Elle mérite le prix de la chute féminine de l'année 10/10 »
« Elle est descendue et a été directement... Bon, je n'aurais même pas le courage d'être près d'une telle vague, mais je ne dirais pas qu'elle a surfé cette vague... »
« Elle a chuté en bas de vague. Comment cela peut-il être un record ? »
Les commentaires sont nombreux, et la plupart sont positifs, félicitantla surfeuse Laura Enever, même ceux qui spéculent sur la validité du record en raison de sa chute.
Personne ne nie l'immensité de la vague. Mais, comme en droit, la jurisprudence Benjamin Sanchis devrait s'appliquer, cette vague devrait participer au wipe out de l'année.
